Seiya contemplait avec une
surprise non dissimulée le paysage rocheux qui l'entourait, et qui
lui était des plus familiers.
Il était sur l'une des
pentes du Mont Fuji, au Japon.
A présent, il en était
certain : le Samurai maîtrisait bien des techniques de téléportation,
comme celle que connaissaient Mü et son petit apprenti, Kiki...
« Tu te trompes, Chevalier,
ce n'est pas de la téléportation...
-
Qu'est-ce alors ?
-
Ma technique n'a rien du tour de passe-passe... Ceux
qui l'utilisent tout comme moi et qui l'appellent ainsi n'ont tout
simplement pas atteint le niveau de conscience permettant de
comprendre ce qu'ils font. Ils utilisent un outil sans savoir
comment il fonctionne vraiment...
-
Traiterais-tu le Chevalier d'Or du Bélier d'imbécile
?!
-
Ne t'énerves pas, Chevalier. Ecoute plutôt. J'ai un
marché à te proposer, et en gage de ma bonne foi, je peux
t'expliquer comment je nous ai « téléporté. » M'écouteras-tu
?
-
Oui. Vas-y, je t'écouterai. »
Le Samurai s'immobilisa
alors, de la plus parfaite façon, puis l'écho de sa voix se fit
dans l'esprit de Seiya.
« Chevalier d'Athéna,
qu'est-ce que l'espace
d'après toi ? »
L'écho de cette question
persista un moment, mais devant le silence de Seiya, le Samurai
poursuivit :
« L'espace tridimensionnel
tel que l'homme le conçoit habituellement n'existe pas. Il n'est
qu'une simple illusion parmi d'autres... »
Le Chevalier Pégase restait
muet. A ses mots, Seiya se rappela en effet sa rencontre avec Shaka,
le Chevalier d'Or de la Vierge, qui avait énoncé une vérité
semblable. Le monde n'était qu'illusion, un monde vain, une épreuve
à subir.
« Détourne-toi de ces
propos, des paroles inutiles qui ne servent à rien d'autres qu'à
te dissimuler la réalité
derrière un vernis de spiritualité... L'espace n'existe pas, tout
simplement. Tout ce qui est
se trouve au même point,
celui qui détermine la réalité elle-même. »
Seiya restait muet d'incompréhension.
Comment l'espace pouvait-il ne se résoudre qu'à un seul point ?
« C'est une question d'énergie,
Chevalier. Essaie de comprendre. Chaque particule de ton être quand
elle se meut voit son niveau d'énergie fluctuer : c'est cette
fluctuation qui engendre sa différenciation du point de réalité
originel, et engendre l'illusion de l'espace. »
Un silence passa.
« Tu as bien compris,
Chevalier Pégase.
Tout à l'heure j'ai modifié
ton niveau d'énergie de sorte que ton corps change de direction
dans l'espace tridimensionnel, cela afin que tu te précipites sur
mon sabre. J'ai dans un second temps modifié les nôtres ensemble
pour nous ramener ici, chez moi, au Japon. Veux-tu encore une autre
preuve de ce que j'avance ? »
Seiya acquiesça du regard,
et soudain la réalité changea : en face de lui il vit, comme par
une étrange lucarne dans l'espace, se découper la surface
circulaire de l'arène d'Ares. Il vit les visages étonnés des
autres Chevaliers après sa disparition, se demandant où les deux
adversaires étaient passés.
« Ce que tu vois n'est qu'un
usage parmi d'autre d'une capacité banale pour celui qui connaît
le véritable aspect de la réalité... Ce que l'on appelle les
dimensions de la réalité ne sont que la même réalité affublée
de niveaux d'énergie différents. C'est aussi simple que cela.
-
Pourquoi me dis-tu tout cela, Samurai ? Qu'attends-tu
de moi ?
-
Prends cela comme un gage de confiance. Tu sais à présent
que tu n'es pas de taille face à moi : seul un véritable Chevalier
d'or aurait pu espérer me vaincre, et de tous ceux que je connais,
seul celui que tu appelles Shaka aurait été à ma hauteur...
-
Dis-moi ce que tu veux, Samurai ! »
Le Berserker plongea son
regard sombre droit dans ceux de Seiya, comme pour sonder son âme.
« Dis-moi Chevalier,
pourquoi te bats-tu contre moi ?
-
Parce que toi et les autres Berserkers détenez les âmes
des millions de victimes du réveil d'Ares. Je dois te battre pour
les ramener à la vie, comme il en a déjà été fait avec le
Chasseur et le Duelliste !
-
Que me répondras-tu alors si je te dis que je n'ai
pris aucune âme ? »
Seiya en resta bouche-bée.
« Tu mens.
-
Je ne mens pas, Chevalier Pégase. Regarde vers la
vallée, et vois, malgré les torrents de lave que j'ai déversés,
que le japon ne déplore pour l'instant aucune victime.
-
C'est... c'est vrai. Mais que... qu'est-ce que cela
signifie, Samurai ?!
-
Ma proposition sera simplement formulée, Chevalier.
Je te demande de trahir Athéna comme j'ai décidé de trahir Ares,
et de te joindre à moi, et à tous ceux qui ont juré la perte des
dieux...
-
QUOI ?!! Tu me demandes d'abandonner Athéna ? »
Seiya trembla, complètement
abasourdi. Le Samurai poursuivit :
« Oui, tu as bien compris,
Chevalier Pégase. Les dieux dirigent la destinée de l'Homme depuis
bien trop longtemps. Il est temps de rendre à l'Humanité son
libre-arbitre ! La volonté des dieux n'est que colère, passion et
querelles. L'Homme n'est qu'un pion dans leurs jeux futiles. Trop de
vies ont été perdues dans leurs affrontements insensés. Voila
pourquoi je n'ai pris la vie de personne, car mon idéal diffère désormais
de celui d'Ares. Les dieux ont fait de nous leurs jouets. Il est
temps pour nous de libérer l'Humanité de leur emprise ! »
Seiya en eut le souffle coupé.
Parmi les Berserkers il y
avait des traîtres à Ares. Des traîtres qui lui demandaient de
trahir Athéna.
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