Elle avait préféré rester à l’écart des autres,
non pas parce qu’ils ne lui manifestaient pas le respect
qu’ils lui devaient, mais parce qu’elle avait besoin de calme,
pour réfléchir.
La Walkyrie contempla le paysage rocheux que le
Seigneur de la Guerre avait choisi pour organiser le Tournoi. Un décor
sombre et sauvage, digne des plus grands champs de bataille…
Mais ce qui allait se passer n’était pas une véritable
guerre. Elle grogna intérieurement.
Un Tournoi. Un simple et vulgaire tournoi, voilà ce
qui l’attendait.
Elle aurait préféré partir à l’assaut du
Sanctuaire d’Athéna, décimant les rangs des Chevaliers de
cette déesse qu’elle haïssait, mais le Seigneur Ares en avait
voulu autrement, et elle ne pouvait qu’obéir.
Elle s’était étonnée de l’effrayante puissance
qu’il avait déployée lors de son réveil, qui cette fois fut
un véritable déchaînement de la furie des éléments. Jamais il
n’était allé aussi loin dans le massacre de victimes
mortelles.
Elle remua alors ses plus lointains souvenirs, loin
dans le passé des hommes. Elle se souvint d’une époque où son
ancien seigneur, le grand Odin, était le premier allié du
Seigneur de la Guerre. Elle se souvint de ces grandes batailles,
sanglantes et meurtrières, où elle parcourait les rangs ennemis,
massacrant tous ceux qui s’opposaient à la volonté commune de
ses deux Seigneurs. Oui, il y avait eu une époque où Odin et
Ares avaient été amis.
Mais elle arriva, un jour, brisant leur alliance.
Cette maudite déesse.
Elle avait corrompu l’esprit d’Odin, et lui fit
perdre d’abord sa force, puis sa noblesse… Odin changea ainsi
de camp, et rallia ses forces à celles d’Athéna, promettant de
maintenir désormais le niveau des glaces de chaque pôle.
Mais elle, la Walkyrie, refusa.
Elle ne pouvait tolérer un tel revirement, qui
trahissait sa propre raison d’être. Elle était née du sang et
des cris de fureurs, de la rage de la Terre indomptée crachant
tout le feu de ses entrailles, du Ciel fier et farouche broyant
ses ennemis dans des grondements de tonnerre… Il lui revenait de
choisir les plus valeureux guerriers et de leur montrer la voie du
Walhalla. Elle était la pureté d’une volonté, la détermination
du guerrier entièrement voué au combat. Elle était la Walkyrie,
cette même Pureté au combat, la Vierge des Batailles...
Un arc électrique s’échappa de ses doigts alors
que la tension montait en elle.
Le comportement d’Ares lui semblait donc curieux.
Elle ne s’attendait pas à ce qu’il joue un tel jeu avec Athéna.
Inconsciemment, elle en vint à se méfier, mais se
reprit rapidement.
Elle vouait une confiance absolue au seigneur de la
Guerre, et jamais elle ne laisserait sa loyauté être remise en
question. Jamais.
Elle sentit, profondément en elle, les pleurs de la
petite Flamme. Elle, la Walkyrie, avait tenté de fusionner son
esprit avec celui de sa nouvelle incarnation, mais sans son
consentement, elle avait échoué. Elle avait donc écarté
l’esprit de la jeune prêtresse, et attendait le moment où
celle-ci capitulerait. L’esprit de cette enfant, qui lui avait
paru si fragile, était pourtant des plus puissants. Quel dommage
de la voir refuser la fusion de leurs âmes : quelle
puissance pourraient-elles déployer, ensemble !
Mais elle ne s’en formalisait pas. A un moment ou un
autre elle cèderait, et leur puissance ne ferait plus qu’une.
Elle sentit soudain l’Appel d’Ares résonner dans
son esprit.
Le Tournoi allait enfin
commencer.
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