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V |
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Hiver 1088. Le 14 janvier.
Cet enfant est doué, sans doute le plus doué que j'ai jamais rencontré. Il m'assiste avec efficacité et promptitude, et apprend vite. Il agit avec esprit, mais garde le coeur affectueux pour autrui. Je me suis peu à peu attaché à lui, et le considère déjà comme le futur héritier de mon nom. Je m'avance sans doute un peu trop, mais je prie le destin de me suivre dans cette voix que lui ouvre.
Nous sommes arrivés il y a déjà trois semaines dans cette région, et servons la famille noble qui règne sur ces terres en attendant notre départ vers le Sud par bateau, en mars. Le Seigneur samurai de ce lieu est un homme honorable, et bon. Il gère les activités portuaires qui sont sous sa juridiction avec efficacité. Il est marié à une membre de la Famille Impériale, ce qui grandit d'autant son statut, et leur enfant, une fille unique, doit avoir le même âge que le petit Jiro. C'est une enfant vive, presque impétueuse, et elle semble faire le désespoir de sa nourrice à force de tours pendables.
Je l'ai vu passer beaucoup de temps avec mon apprenti, à chacune de mes visites au Palais de ce seigneur, et il semble qu'elle se soit pris d'affection pour l'enfant de paysan qu'il est. Son père ne s'est pas opposé à ce qu'elle joue avec Jiro, mais il ignore les origines paysannes de mon apprenti, le prenant pour un de mes neveux sans doute. Je n'ose le détromper, de peur de déclencher sa colère.
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Hiver 1088. Le 24 janvier.
J'ai à peine le temps de coucher ces quelques mots, tellement la situation ici est grave.
La Peste Rouge a frappé, à nouveau, et tout le port a été mis en quarantaine, par Ordre de l'Empereur. J'ai joint mes efforts aux prêtres et médecin de la Cité, mais nous sommes débordés. Le Nouvel An, qui a lieu dans une semaine, se révèlera le plus sombre qu'aura connu la région depuis des décennies.
Si seulement nous trouvions un moyen de prévenir la Peste de survenir !
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Hiver 1088. Le 26 janvier.
La situation a empiré. La jeune Princesse Pimiko a été touchée à son tour par la Peste Rouge, mais mes remèdes, comme le pouvoir des Prêtres, ne semblent pas la guérir. Son père est désespéré, et il a déjà fait exécuter un autre médecin pour incompétence.
La tension est à son comble.
Je prie Zanonai pour que la situation s'améliore.
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Hiver 1088. Le 30 Janvier.
La Princesse Pimiko est au seuil de la mort. La plupart des médecins ont perdu tout espoir de la guérir, alors que, paradoxalement, la situation dans le reste de la ville s'est grandement améliorée.
Le teint de la Princesse a viré au rouge vif, symptôme terminal de la Peste Rouge, et les ganglions à ses articulations ont enflé, et sont à présent sur le point d'éclater. Son sang est presque complètement corrompu par la maladie, et elle mourra dans les prochaines heures, peut-être demain.
Je loge désormais au Palais avec Jiro à présent, car la père de la Princesse me croit encore capable de la sauver. Il m'a accordé sa confiance, et je ne le décevrai pas.
Le devoir d'un Médecin est de sauver des vies, autant que possible. Telle est la Voie Karmique que nous empruntons. Jiro a appris cela, et le voir au chevet de la Princesse tous les soirs à mes côtés me renforce dans l'idée qu'il ferait un excellent Médecin.
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Hiver 1088. Le 31 Janvier.
Ce Nouvel An s'ouvre sur un véritable miracle.
J'étais au chevet de la Princesse avec Jiro, et nous nous sommes endormis.
A notre réveil, ce matin, la Princesse était guérie. Son teint était redevenu clair, et les ganglions se sont résorbés.
Tout le monde parle de miracle, mais je sais moi-même n'y être pour rien. Ce n'est pas moi qui ai vaincu la Peste Rouge. Quand j'ai porté mon regard sur Jiro, ce matin, son teint était pâle, et il m'a paru épuisé. Est-ce le contre-coup de la fatigue de ces derniers jours ? Quand j'y pense, je songe à une autre raison pour laquelle la Princesse a pu être guérie, mais...
Les notes qui suivent ont été brulées lors du grand incendie de 1091, alors que Samu-sensei et Jiro était de passage dans la cité de Saichu.
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Hiver 1088. Le 1er Fevrier. (Le texte reprend ici)
[...] Mes doutes se sont avérés fondés. C'est bien Jiro qui a sauvé la Princesse, pour un prix dont je n'ose parler.
L'esprit-kami de la Peste risque de gagner ce pari insensé, mais je prie Zanonai pour pouvoir être au côté de mon apprenti lorsque lui et la Princesse devront payer leur dû.
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Printemps 1094. Le 26 Mai.
La condamnation a été prononcée, et je serai exécuté cette nuit. Je n'ai pas protesté outre-mesure, et j'ai demandé à Jiro de ne rien tenter à l'encontre du Daimyo.
Mon jeune Disciple aura beau crier à l'injustice, il est des situations que le Destin impose, et qu'il est vain de nier. J'ai sauvé ce nourrisson et sa mère, car j'ai considéré leur vie comme plus précieuse que celle du frère du Daimyo. Ce dernier restera paralysé toute sa vie, à cause du retard avec lequel je suis venu lui administrer mes soins, et le Daimyo a eu raison de me punir pour ma flagrante désobéissance. J'ai sauvé la vie d'une paysanne et de son enfant qu détriment d'un samurai.
J'ai vu les larmes dans les yeux de Jiro, il y a à peine une heure. Je lui ai légué mon nom en lui faisant mes adieux. Il sera le nouveau "Samu" et je suis certain qu'il sera digne de ce nom.
Puisse ma prochaine vie être meilleure.
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